Note d’arrêt – Conseil d’État, 9ème – 10ème chambres réunies, Inédit au recueil Lebon, 499763, 13/06/2025
Titre : Conseil d’État, 9ème – 10ème chambres réunies, Inédit au recueil Lebon
Numéro : 499763
Décision : Non-lieu à renvoi au Conseil Constitutionnel
Rapporteur : M. Réda Wadjinny-Green
Rapporteur Public : Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SARL Gury & Maître
Date de lecture : 13 juin 2025
Faits :
La société FRF2 Apollo a introduit un mémoire devant le Conseil d’État contestant la constitutionnalité du II de l’article 1518 ter du code général des impôts (CGI). Cette contestation intervient dans le cadre d’un litige relatif à la valeur locative de locaux professionnels et plus précisément à l’application des coefficients de localisation. La société requérante considère que les dispositions contestées portent atteinte au droit à un recours effectif.
Procédure :
1. Le 17 mars 2025, la société FRF2 Apollo enregistre un mémoire au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, contestant la constitutionnalité du II de l’article 1518 ter du CGI.
2. La société fonde sa demande sur l’article 23-5 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958.
3. Le Conseil d’État examine la question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
4. Après examen des pièces du dossier, le rapport de M. Réda Wadjinny-Green, les conclusions de Mme Céline Guibé et les observations de la SARL Gury & Maître, le Conseil d’État rend sa décision.
Problème juridique :
Les dispositions du II de l’article 1518 ter du CGI, en ce qu’elles encadrent la modification des coefficients de localisation par la commission départementale des valeurs locatives (CDVL), portent-elles atteinte au droit à un recours effectif garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, notamment en limitant la possibilité de contester les décisions de la CDVL ?
Solution :
Le Conseil d’État juge qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. Il considère que les décisions de la commission départementale des valeurs locatives (CDVL) relatives aux coefficients de localisation, qu’il s’agisse de leur modification, de leur maintien ou de leur absence d’application, sont susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif dans le délai de recours contentieux. Par conséquent, les dispositions contestées du II de l’article 1518 ter du CGI ne portent pas atteinte au droit à un recours effectif. La question soulevée n’est pas nouvelle et ne présente pas un caractère sérieux justifiant un renvoi au Conseil constitutionnel.
Portée :
Cet arrêt précise que les décisions de la CDVL concernant les coefficients de localisation sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir. Il confirme l’interprétation selon laquelle chaque échéance de révision des coefficients de localisation offre une opportunité de recours, assurant ainsi le respect du droit à un recours effectif. Il rappelle que le droit à un recours effectif implique que les personnes intéressées doivent avoir la possibilité de contester les décisions administratives affectant leurs intérêts.
Dispositif :
Article 1er : Il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société FRF2 Apollo.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société FRF2 Apollo et au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.
Intérêt de l’arrêt :
Cet arrêt est important pour plusieurs raisons :
1. Clarification du droit au recours : Il clarifie le droit des contribuables à contester les décisions relatives aux coefficients de localisation, élément essentiel dans la détermination de la valeur locative des locaux professionnels et donc des impôts locaux. L’arrêt souligne que chaque décision de la CDVL, qu’elle modifie, maintienne ou n’applique pas un coefficient, peut être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir.
2. Confirmation de l’absence d’atteinte au droit à un recours effectif : Le Conseil d’État valide la conformité de l’article 1518 ter du CGI avec les exigences constitutionnelles en matière de droit à un recours effectif. Cela rassure sur la validité de la procédure de révision des coefficients de localisation.
3. Implications pour les contribuables : Cet arrêt est favorable aux contribuables dans la mesure où il confirme leur droit de contester les décisions de la CDVL relatives aux coefficients de localisation. Il incite les contribuables à surveiller les décisions de la CDVL et à exercer leur droit de recours en cas de désaccord.
4. Précisions sur la notion de question sérieuse : Le Conseil d’État rappelle les conditions de recevabilité d’une QPC, notamment la nécessité que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux. En l’espèce, il considère que la question ne présente pas un caractère sérieux, ce qui contribue à affiner les critères d’appréciation de la notion de “question sérieuse” en matière de QPC.
5. Conséquences pour l’administration fiscale : L’administration fiscale doit s’assurer que les décisions de la CDVL relatives aux coefficients de localisation sont suffisamment motivées et transparentes, afin de faciliter l’exercice du droit de recours des contribuables et d’éviter les contentieux.
En résumé, cet arrêt est un jalon important en matière de fiscalité locale et de droit à un recours effectif. Il clarifie les droits des contribuables et les obligations de l’administration en matière de coefficients de localisation, tout en contribuant à la jurisprudence relative aux questions prioritaires de constitutionnalité.
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