Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 2 juillet 2025, 25-40.011, Publié au bulletin
#Mots-clés: QPC, Redressement Judiciaire, Créancier Dissident, Irrecevabilité
Fiche technique :
* Titre : Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 2 juillet 2025, 25-40.011, Publié au bulletin
* Numéro de pourvoi : 25-40.011
* Décision : Qpc seule – irrecevabilité
* Rapporteur : M. Riffaud
* Rapporteur Public : Mme Henry
* Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Ortscheidt, SCP Piwnica et Molinié, SCP Célice, Texidor, Périer, SAS Hannotin Avocats
* Date de lecture : 2 juillet 2025
Faits :
Le 15 février 2023, la société Financière Immobilière Bordelaise (FIB) a été placée en redressement judiciaire. Les sociétés CBF et Associés et Ajassociés ont été désignées en qualité d’administrateurs judiciaires, tandis que les sociétés [V] [W] et Ekip’ ont été désignées en qualité de mandataires judiciaires.
Dans le cadre de cette procédure, les administrateurs ont constitué des classes de créanciers, appelées “parties affectées”, et les ont convoquées pour voter sur un projet de plan de redressement lors d’assemblées qui se sont tenues les 8 et 12 novembre 2024.
Les sociétés AEW opportunités Europe, Laffitte Pierre, AEW commerces Europe, Atout Pierre diversification et SCI Marveine, en tant que créanciers bailleurs, ont voté contre l’adoption du projet de plan de redressement.
Procédure :
1. Redressement judiciaire de la société Financière Immobilière Bordelaise (15 février 2023).
2. Constitution de classes de parties affectées par les administrateurs judiciaires.
3. Vote sur le projet de plan de redressement (8 et 12 novembre 2024) : vote contre des créanciers bailleurs (AEW opportunités Europe, Laffitte Pierre, AEW commerces Europe, Atout Pierre diversification et SCI Marveine).
4. Absence de recours des créanciers bailleurs contre le projet de plan dans le délai prévu à l’article R. 626-64, I du code de commerce.
5. Saisine du tribunal de la procédure collective par les créanciers bailleurs aux fins de transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité (10 mars 2025).
6. Transmission de la QPC à la Cour de cassation par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux (26 mars 2025, rectifié le 2 avril 2025).
7. Intervention volontaire de plusieurs créanciers (Klesia Finances, Mutuelle d’assurance carcept prev, Klesia prévoyance, Klesia, Blue Night COF I LP, Marston Limited, Flornoy Ferri, La Sécurité familiale assurances, Decalia SICAV) pour soutenir la transmission de la QPC au Conseil constitutionnel (13 juin 2025).
Problème juridique :
La Cour de cassation devait déterminer si un créancier dissident à un plan de redressement judiciaire, qui n’a pas exercé le recours spécifique prévu par l’article R. 626-64, I du code de commerce pour contester le projet de plan, est recevable à soulever une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) lors de l’instance d’adoption de ce plan.
Solution :
La Cour de cassation a déclaré la question prioritaire de constitutionnalité irrecevable. Elle a considéré que le créancier dissident qui n’a pas saisi le tribunal de la requête prévue à l’article R. 626-64, I du code de commerce n’est pas partie à l’instance en adoption du plan. Par conséquent, il est dépourvu de qualité pour déposer une demande de transmission d’une QPC. L’intervention volontaire des autres créanciers soutenant le renvoi de la QPC est donc sans objet.
Portée :
Cet arrêt précise les conditions de recevabilité d’une question prioritaire de constitutionnalité dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire. Il souligne l’importance pour les créanciers dissidents de respecter les voies de recours spécifiques prévues par le Code de commerce, notamment l’article R. 626-64, I, pour pouvoir contester le plan et, le cas échéant, soulever une QPC. A défaut, leur demande sera déclarée irrecevable.
Dispositif :
La Cour de cassation déclare irrecevable la question prioritaire de constitutionnalité.
Intérêt de l’arrêt :
Cet arrêt présente un intérêt pratique significatif pour les praticiens du droit des entreprises en difficulté. Il rappelle avec force l’articulation entre les voies de recours spécifiques en matière de redressement judiciaire et la possibilité de soulever une QPC. Il met en exergue le fait qu’un créancier qui n’a pas exercé les recours prévus par le Code de commerce perd le droit de contester la constitutionnalité d’une disposition législative applicable au plan de redressement.
En d’autres termes, cet arrêt incite les créanciers à être particulièrement vigilants quant au respect des délais et des procédures prévus par le Code de commerce. Le non-respect de ces règles procédurales peut avoir des conséquences importantes, notamment la perte de la possibilité de contester la constitutionnalité du plan de redressement.
De plus, cet arrêt clarifie la notion de “partie à l’instance” au sens de l’article 23-1 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. Il indique clairement qu’un créancier dissident qui n’a pas exercé le recours prévu à l’article R. 626-64, I du code de commerce n’est pas considéré comme une partie à l’instance en adoption du plan et ne peut donc pas soulever une QPC.
Enfin, la Cour de cassation a estimé que l’intervention volontaire des autres créanciers soutenant le renvoi de la QPC est sans objet, confirmant ainsi que la recevabilité de la QPC se détermine au regard de la situation de la partie qui la soulève initialement.
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